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Le livre « Les enfants du Fort Boyard » passé au crible !

Entretien avec Yannick Mitton

Publié le jeudi 10 juillet 2008 par Guillaume COMONT - Rédacteur en chef dans la rubrique Produits dérivés.

        

Même si le livre « Les enfants du Fort Boyard » de Madeleine Tiollais, sorti l’été dernier, est encore peu connu du grand public et même des fans de Fort Boyard, certains l’ont malgré tout déjà lu. C’est le cas de Yannick Mitton, étudiant en Lettres qui, après avoir lu intégralement le livre, a accepté de répondre à nos questions. C’est en toute franchise qu’il donne son avis sur ce roman et nous permet ainsi de nous faire une plus large idée sur ce livre. Entretien avec un passionné de « Fort Boyard » et de littérature.

Fort Bavard : Bonjour, avant de débuter notre interview, pouvez-vous nous préciser quelles sont vos activités professionnelles actuelles, ce à quoi vous aspirez et vos références littéraires ?

Yannick Mitton : Bonjour. Je suis actuellement en licence de Lettres-Allemand à l’université de Chambéry (73) et j’aspire à devenir professeur des écoles.

En ce qui concerne mes références littéraires, je reste assez classique tout en privilégiant tout ce qui met en avant l’imaginaire comme le fantastique, la plupart des œuvres romantiques et surréalistes. Je m’intéresse aussi beaucoup aux mythes de toutes sortes et aux contes de fées comme Alice aux pays des Merveilles de Lewis Carroll (cf. mon site www.aliceaupaysdunet.org)

Fort Bavard : A quelle occasion avez-vous découvert l’existence de ce livre ? Connaissiez-vous déjà Madeleine Tiollais, l’auteur de ce livre ?

J’ai appris l’existence de ce livre par votre site www.fortboyard.net qui me donne toujours beaucoup d’informations sur Fort Boyard et ce qui tourne autour.
Je ne connaissais donc pas Madeleine Tiollais, mais j’aurais pu déjà en entendre parler car elle a déjà écrit quelques ouvrages se rapportant à l’histoire, de nombreuses nouvelles et poèmes.

Fort Bavard : Avez-vous réussi à vous procurer facilement le livre ?

Oui, très facilement, par le biais d’une librairie.

Fort Bavard : Pour commencer, pouvez-vous nous faire un bref résumé du roman ?

Le roman commence par l’irruption , le 8 Septembre 1833 de l’impératrice déchue Marie-Louise, deuxième femme de Napoléon 1er, chez Maître Tardieu, un des héros du roman, habitant l’île d’Aix.

Elle lui parle d’un trésor que Napoléon a caché dans les soubassements du fort (je rappelle que le fort n’est qu’à l’état de fondations à cette époque). Selon la volonté de Napoléon et de l’Aiglon qui vient de mourir, Maître Tardieu en est maintenant le gardien à part entière car Marie-Louise lui remet les clés des coffres.

Après ce premier chapitre, nous revenons dans le passé où nous découvrons Raymond Tardieu, enfant et la genèse de tout ce qui a permis la construction de Fort Boyard. Raymond se fera sauver d’une noyade par un officier de marine Victor Besson qui deviendra son ami. Ainsi nous allons pouvoir vivre toutes les étapes importantes de la construction du fort ainsi que ses problèmes (comme l’affaire des brûlots ordonnée par la marine anglaise qui provoqua la première fin du chantier et de l’aventure napoléonienne pour fort Boyard).

Fort Bavard : Quelles en sont les figures emblématiques ?

Les personnages les plus importants sont naturellement Maître Tardieu, ainsi que Victor Besson, avec toujours l’omniprésence de Napoléon qui viendra deux fois en personne à l’île d’Aix dans l’histoire. Une fois en pleine gloire, une autre en tant qu’empereur déchu.
La famille Delfis (surtout les frères et sœurs Joseph et Maria) joueront aussi un petit rôle qui se révélera toujours plus ou moins négatif. Je peux encore parler du commandant anglais Lord Maitland et de son entourage qui seront toujours présents avec les incessantes guerres contre les anglais.

Pour terminer, je peux dire qu’il y a une très grande galerie de personnages que l’on retrouvera tout au long du livre, comme Alphonsine, la guérisseuse du village, Emilie qui s’occupe du père veuf de Raymond, Cécile la fille d’Emilie, le premier amour de Raymond, le curé, le maire, etc...

Fort Bavard : Dans quel contexte se situe l’histoire ?

L’histoire se déroule de la fin du XVIIIème siècle jusqu’à la moitié du XIXème siècle environ. On passe de l’enfance de Raymond bercée par tous les espoirs de la Révolution française, à l’avènement de l’Empire où l’histoire du livre et de Fort Boyard commencera pour de bon. On est donc dans le contexte du blocus continental et des interminables rivalités et batailles contre les anglais. Je rappelle que la construction du fort était avant tout motivée par cette proximité des anglais. Le Fort devait servir à barrer la route à ces derniers entre l’île d’Aix et d’Oléron pour les empêcher de piller les villes environnantes comme Rochefort par exemple.

D’ailleurs, l’histoire se passe presque toujours dans les environs de l’île d’Aix.

Fort Bavard : Cette histoire a-t-elle des traits réalistes ou s’inscrit-elle clairement dans le cadre du roman imaginaire ?

Cette histoire est vraiment très bien ancrée dans l’histoire, une très grande recherche de documentation sur l’époque et la vie quotidienne entre autres a été faite. Cette histoire a donc bien plus que des traits réalistes elle aurait très bien pu se passer vraiment. Le texte reprend des faits historiques que nous vivons en direct à travers les yeux des personnages du roman, et donne la parole à des personnages existants comme Napoléon ou Marie-Louise, mais aussi à des militaires assez célèbres.

L’auteur légitimise aussi certains de ces personnages comme Victor Besson, par des explications historiques. La rédaction de cet écrit a donc été élaboré avec beaucoup de rigueur par rapport à l’Histoire, même si l’auteur en début de livre stipule bien qu’elle est romancière et pas historienne et qu’elle a pu prêter à des personnages historiques des actes et un comportement discutable, voire non conforme à la réalité.

Fort Bavard : Finalement, dans quel genre mettriez-vous ce roman ?

Sans hésiter, dans le roman historique. Comme la plupart des livres de ce genre, l’auteur situe son histoire dans un lieu et à une époque précise et ajoute par dessus une histoire qui pourrait être vraisemblable et qui est toujours plus intime, donc quasiment toujours non-vérifiable par l’Histoire.

Fort Bavard : Emportez dans le tourbillon de notre lecture, pourrons-nous nous laisser porter par les événements et imaginer cette histoire comme vraie ?

Oui, exactement. Cette histoire aurait bien pu être réelle. L’auteur reprend à son compte l’épopée napoléonienne de la construction du Fort, et ainsi que tous les matériaux historiques disponibles en brodant une histoire plus triviale sur ceux-ci. Elle utilise aussi les légendes, comme celle qui dit que Napoléon aurait caché un trésor dans les fondations du Fort, pour reprendre sa construction quand l’Empire reviendrait en France. Même si c’est la royauté française avec le roi Louis-Philippe 1er qui a fini le Fort, c’est bien le neveu de Napoléon, Napoléon III qui utilisera le plus la célèbre Forteresse en tant que prison.

L’auteur mêle aussi à son récit quelques anecdotes historiques qui ont à voir de près ou de loin avec son texte : elle parle du naufrage de la frégate La Méduse ainsi que de la présence rapide de Choderlos de Laclos sur l’île d’Aix.

Fort Bavard : Est-ce un livre envoûtant, que nous ne pourrons plus quitter en l’ayant commencé ou au contraire, un livre soporifique possédant quelques longueurs ?

Ce livre a un certain charme qui nous pousse à continuer notre lecture, le passage de Marie-Louise à l’île d’Aix servant de moteur. Mais cependant, je trouve qu’il y a quelques longueurs au niveau de certains chapitres comme quelques passages de la construction du Fort. Cependant les actions s’enchaînent ensuite de façon rapide et apportent du dynamisme au récit qui va enfin nous donner les réponses attendues aux interrogations du premier chapitre.

Fort Bavard : Au niveau du style de l’écriture, comment le caractériseriez-vous ?

L’auteur se distingue par un style très soutenu qui décrit tout ce que l’on rencontre de façon précise. L’auteur ne laisse rien au hasard et nous raconte tout du début à la fin en ce qui concerne les événements du livre. Avec certaines descriptions parfois à la manière de Balzac, on a une parfaite vision de ce que voit le personnage, cela peut aussi représenter un inconvénient quand la description n’en finit plus. C’est assez rare dans ce récit qui veut plutôt nous offrir tous les éléments nécessaires pour comprendre cette époque et ses coutumes, parfois avec des scènes hautes en couleur. L’auteur d’ailleurs ne se gène pas pour utiliser le langage relatif à chaque personnages, comme le français maladroit et argotique du peuple par exemple.

Au niveau de la construction du récit, chaque chapitre est divisé en sous-chapitres. Ces derniers changent souvent de points de vue, en parlant par la voix d’un autre personnage d’une même scène ou d’un événement se passant en même temps qu’un autre. Il peut aussi faire des bonds dans le passé ou le futur. Cela peut dans un premier temps troubler le lecteur, mais on s’y fait vite, même si on a toujours un peu de mal à situer l’action du sous-chapitre quand on commence tout juste à le lire. Peut être un jeu de l’auteur avec ses lecteurs !

Fort Bavard : Ménage t-il un certain suspense de la première à la dernière page ou se perd t-il en longues descriptions ?

Le suspense est préservé dans le sens où on connaît la situation familiale,.. de Maître Tardieu adulte, et pendant tout le roman on essaie de raccrocher cette première situation avec celle de l’enfant, de l’adolescent et du jeune adulte. L’auteur ne nous laisse pas trouver la solution facilement et nous mène sur beaucoup de fausses pistes.

Fort Bavard : Selon vous, à qui s’adresse ce roman en priorité ? A qui le recommanderiez-vous ?

Ce roman s’adresse en priorité à tous les amateurs d’Histoire en général, ainsi qu’au lecteur curieux de tout et aimant les bons romans. Je le recommande tout spécialement aux fans de Fort Boyard, car la plus grande époque historique du Fort est ici traitée.

Fort Bavard : Ce livre vous semble t-il posséder un bon rapport qualité/prix ?

Le livre coûte 25 euros et on ne regrette pas notre argent pour la qualité du récit, par contre, en ce qui concerne le livre physique, la couverture me semble assez fragile et demande beaucoup de soin.

Fort Bavard : Pouvez-vous nous donner trois avantages et trois inconvénients majeurs que détient le livre ?

Les plus grands avantages du livre sont de nous donner une bonne connaissance de l’époque traitée, ainsi que de la construction du Fort, le livre a aussi une grande qualité littéraire au niveau de la langue, l’auteur arrive aussi bon an, mal an à nous captiver jusqu’à la fin du livre.
Au niveau des inconvénients, je peux citer les quelques longueurs que contiennent certaines descriptions, et parfois le fait de raconter un fait dans ses moindres détails qui peut se révéler comme un avantage mais aussi comme un inconvénient. Même remarque pour la construction des chapitres en sous-chapitres, on peut parfois être égaré.

Pour terminer, la relative fragilité du livre au niveau de la couverture peut aussi être considéré comme un inconvénient en dehors de l’aspect littéraire du livre.

Fort Bavard : Si vous aviez une note à lui donner, ce serait... ?

Je pense pouvoir donner un bon 16/20 qui me paraît mérité, pour toutes les qualités citées ci-avant.

Fort Bavard : D’après-vous, est-ce que tous les ingrédients sont réunis pour faire de ce livre une œuvre de qualité ?

Bien sûr, on nous raconte la vie d’un enfant qui a vécu la construction du Fort, plus tard en tant qu’ouvrier. On connaît tous ses espoirs et ses déceptions, mais aussi son attachement au Fort. Ce livre rend donc cette construction très humaine car on nous raconte tous les problèmes des travailleurs ainsi que les accidents. La plupart des réactions que l’âme humaine peut éprouver dans pareille condition nous est aussi exposée.

Fort Bavard : Pour finir, pensez-vous que ce livre apportera un souffle nouveau à la littérature sur le thème de « Fort Boyard » ?

Je ne pense pas. Tout simplement parce que même si ce livre parle du Fort Boyard du début à la fin, cette histoire reste avant tout comme un épisode de la légende de Napoléon et de la description d’un des plus grands chantiers du XIXème siècle.

Par contre, l’auteur remet aussi au goût du jour certaines légendes comme celle du trésor de Napoléon et surtout celle de son gardien, le gardien du trésor et du Fort, ça ne vous rappelle pas quelqu’un ? Si ces légendes sont réutilisées, les histoires créées seront donc sûrement moins historiques et peut être plus merveilleuses. Nous ne demandons qu’à voir la suite des événements.

Merci beaucoup pour le temps que vous nous avez consacré ! A bientôt sur www.fortboyard.net.


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Interview réalisée par Guillaume COMONT.

« Les Enfants du Fort Boyard » de Madeleine Tiollais, paru en juin 2005, aux éditions Bellier. Prix officiel : 25 euros.

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