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Ressusciter le fort de l’inutile

Par Alain Bastardie, Sud Ouest, 7 juin 1987

Publié le jeudi 9 septembre 2010 par Kévin TOLBIAC dans la rubrique Revue de presse avant 1990.

        

Un couple de La Tremblade veut sauver et animer le célèbre fort Boyard. Une condition : gagner le prix Essor de la promotion régionale. Verdict mardi 9 juin.

Vendu aux enchères le 28 mai 1962 pour 33 000 francs, droits compris, le fort Boyard, dont on estime volontiers qu’en francs constants le coût de sa construction est sensiblement supérieur au pont de Ré en cours d’édification, va peut être se trouver enfin une nouvelle vocation. Un couple de Trembladais, Jean-Jack et Sylviane Fève, a en effet imaginé sa restauration et son animation. Mais il faut espérer investir au moins 3,3 MF pour que le rêve devienne réalité. L’espoir est permis : concourant au prix Essor 87 (une opération de mécénat de la société Esso), le couple fanatique du Boyard a déjà gagné la sélection régionale Poitou-Charentes. Mardi 9 juin, il se retrouve pour la finale nationale avec les projets sélectionnés dans les autres régions de l’Hexagone et des DOM-TOM. Des idées variées, allant de grands voiliers à restaurer aux moulins à vents du Nord dont les ailes sont paralysées. Un enjeu clé pour Jean-Jack et Sylviane Fève puisque le prix Essor signifie 2,5 MF. Sans cette mise de fond initiale, le rêve restera impossible et le Boyard demeurera le fort de l’inutile, le vaisseau de pierres paradis des oiseaux.

Il faut dire que cette forteresse de l’océan a eu une histoire tellement mouvementée que sa vocation première n’a jamais pris corps.

Compte tenu de la portée un peu courte des canons (1 500 m), il fallait établir un rempart entre les îles d’Oléron et d’Aix pour verrouiller la baie. Un sondage maritime décidé par Bonaparte en 1801 retint le site de Boyard. Mais il fallut soixante-deux ans pour qu’il émerge du banc de sable sur lequel il était ancré : il fallut en volume cinq fois les matériaux de l’arc de Triomphe de Paris !

FORT BOYARD. – Le vaisseau-fantôme de pierres appelé à une résurrection hypothétique.

Résultat : achevé, le Boyard n’avait plus de raison d’être car l’artillerie moderne, apparue entre-temps, avait résolu la question. Il servit de prison, lors de la Commune notamment. Mais en 1913, c’est l’abandon : les 2 065 m2 « habitables » et couverts, les 1 500 m2 de terrasse, ses 88 pièces et 21 soutes et citernes pouvant recueillir 300 000 litres d’eau sont voués à l’oubli.

RESTAURANT ET SOLARIUM

Le cinéma va, à deux reprises, braquer l’intérêt sur le monument : Robert Enrico avec « les Aventuriers » (Alain Delon et Lino Ventura), Roger Vadim avec « le Repos du guerrier » (Brigitte Bardot). Mais la résurrection est éphémère.

Jean-Jack et Sylviane Fève veulent, eux, faire quelque chose de durable, partant de l’idée que le sauvetage implique aussi une animation : un restaurant ; l’aménagement de musées polyvalents (sur le fort bien sûr, sur les produits régionaux, sur la marine, etc.), un solarium sur la terrasse.

Mais tout cela n’est pas un petit investissement car bien des difficultés d’infrastructures existent : amener eau, électricité, téléphone sur le fort ; aménager un appontement pour débarquer du continent sur le Boyard. Des travaux d’envergure qui demanderont beaucoup d’énergie. Mais voilà de quoi séduire le mécénat d’une société pétrolière !


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