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Episode 1 : 1661 - 1757 : Premiers projets abandonnés...

Publié le mardi 30 août 2005 par Aurélien LECACHEUR - Directeur de la publication dans la rubrique Histoire du Fort.

        

L’histoire du fort Boyard remonte au 17ème siècle, car c’est à ce moment que la France décide de fortifier ses littoraux. Le projet fort Boyard occupera les ingénieurs et techniciens de la marine française durant plus de deux cents ans, jusqu’à ce qu’enfin un vaisseau de pierre voie le jour à la fin du 19ème siècle. Trois siècles d’histoire sont contenus dans les vingt épisodes de l’histoire du fort que vous découvrirez au fil de l’été. Bonne lecture, l’histoire peut commencer.

Il était une fois un pays, la France. La flotte française est très faible, depuis que Mazarin (1602-1661) conseille le roi Louis XIV. Celui-ci ne se préoccupe guère de la défense du royaume, préférant restaurer l’autorité royale à l’intérieur des terres. Mais à sa mort, le roi Soleil demande au secrétaire d’Etat à la marine, Colbert, de construire un arsenal à Rochefort. Ce centre de construction et d’entretien de navires de guerre pourra, selon les désirs royaux, permettre de contrer les flottes anglaises et hollandaises, qui dominent sur la côte ouest françaises.

En tant que successeur de Mazarin, Colbert doit rénover la marine. Il doit multiplier le nombre de bateaux par six, et ainsi en faire passer le nombre à cent vingt, ensuite lever soixante-dix armées équipées chacune de cinquante canons. Rochefort est le site idéal pour développer la nouvelle flotte, la ville est hors de portée des tirs des canons ennemis. Le petit village devient une ville active de plus de vingt mille habitants, le plus bel arsenal du monde deux siècles plus tard.

Rochefort construit la flotte qui approvisionne la marine française. Mais rapidement, un problème fait surface : la rivière est trop peu profonde, les ouvriers ne peuvent pas terminer la construction sur place. Il est nécessaire de finir les bateaux en rade (dans un bassin qui donne sur la mer), entre les îles d’Aix et d’Oléron.

Cette zone est très mal sécurisée, elle a été de nombreuses fois attaquée par les Anglais au début du 17ème siècle. Sa protection est insuffisante : en effet, les tirs des canons entre les deux îles ne peuvent se croiser, laissant à la portée des canons ennemis une zone sans protection de trois kilomètres, dans laquelle l’ennemi peut s’infiltrer à sa guise.

Devant ce constat, le chevalier De Clerville, commissaire général des fortifications du royaume, réclame d’urgence la construction d’un fort qui permettrait de boucher la rade de Rochefort. Le fort devra croiser ses tirs avec l’île d’Aix et avec l’île d’Oléron. Avec le concours d’un autre ingénieur militaire, La Favolière, De Clerville repère l’emplacement du futur fort de la rade de Rochefort.

L’emplacement est un banc de sable, connu depuis 1585 et qui apparaît sur les cartes hollandaises depuis 1630, sur les cartes françaises manuscrites de De Clerville depuis 1670. Il a été découvert par un Hollandais qui l’a baptisé « Banjaert Hollandis » (on peut le traduire par banc de sable hollandais), devenu « la longe de Boyarts », puis « Boyard » par déformation phonétique.

Le chevalier Sébastien Vauban, qui remplace De Clerville à la tête du commissariat général des fortifications à partir 1668, réalise de nombreux travaux préparatoires et sondages des sols. Devant l’ampleur du travail et le coût exorbitant du projet, Vauban se serait adressé au roi en ces termes : « Sire, il serait plus facile de saisir la lune avec les dents que de tenter en cet endroit pareille besogne ». On sait aujourd’hui que les sondages de l’époque ont été mal effectués, et que techniquement la construction d’un fort à cet endroit était parfaitement possible. Le problème n’est pas tant technique que financier.

En 1674, ordre est à nouveau donné de protéger la rade. Pour ce faire, plus question de construire un fort, personne n’osant remettre en question le spécialiste qui a donné son nom à de nombreuses fortifications « à la Vauban ». Des chaloupes canonnières sont alors utilisées, mais elles sont inutiles par mauvais temps car elles doivent quitter leur poste, et sont trop peu puissantes en cas d’attaque de grande envergure. De Clerville décide de porter les efforts sur les fortifications déjà implantées. Ainsi, le château d’Oléron sera modernisé.

En 1692, le capitaine de vaisseau Descombes, alors officier du Rois Soleil, procède à de nouveaux sondages et fait réaliser d’autres travaux préparatoires. Mais Louis XIV ne verra jamais se construire le château des mers qu’il avait imaginé. Le projet est une nouvelle fois enterré pour des raisons essentiellement financières.

Plus d’un demi siècle s’écoule, sans incident notable pour l’arsenal de Rochefort. Mais le 21 septembre 1757, une armée de six mille Anglais aborde et pille l’île d’Aix, sans que les autorités françaises ne puissent réagir. L’attaque a été longuement préparée, l’île est dévastée en moins d’une heure. Les neufs jours suivant, les Anglais resteront sur place puis rentreront chez eux, sans tenter de percer sur le continent.

Le constat est amer : la rade de Rochefort est une véritable passoire, et l’île d’Aix ne peut pas se défendre seule face à une flotte anglaise surentraînée. Heureusement, pour cette fois, les dégâts sont minimes. Mais cette attaque suffit à ce qu’un ingénieur militaire, Filley, déterre le projet de construction d’un fort à la porte de l’arsenal de Rochefort. Il prend connaissance du projet imaginé par Vauban et ensuite abandonné. Il propose, lui, de construire un fort rectangulaire avec trois côtés armés, le dernier côté abritant un petit port. Une nouvelle fois, à cause du budget considérable qu’il faudrait allouer à une telle construction, près de quatre millions de livres, le projet est abandonné.

Suite de l’histoire du fort : « 1799 - 1809 : Napoléon persévère durant dix ans »


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